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Dec 19, 2023

Le vrai péril de Poutine pour le Canada

Pour protéger le Canada contre l'agression russe, il faut comprendre deux faits simples. La Russie représente une grave menace nucléaire pour le Canada et les États-Unis. Et Vladimir Poutine n'est pas sur le point d'envahir l'Arctique canadien.

Francesca Fionda et des experts de Tyee exploreront la sûreté, la sécurité et les solutions.

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Premièrement, la menace nucléaire : en cas d'attaque russe contre l'Amérique du Nord, les missiles entrants survoleraient l'Arctique canadien, où des stations radar détecteraient la menace et alerteraient l'armée américaine.

Cette alerte précoce permettrait aux missiles terrestres américains du Montana, du Wyoming, du Dakota du Nord, du Colorado et du Nebraska d'être renvoyés vers la Russie avant qu'ils ne puissent être détruits dans leurs silos par la frappe russe.

Le "lancement sur avertissement" est un élément central de la dissuasion nucléaire, qui repose sur la "destruction mutuelle assurée". Le système d'alerte du Nord du Canada — ces stations radar de l'Arctique, exploitées conjointement avec l'armée américaine — est essentiel à cet égard, mais doit être modernisé de toute urgence.

Dans les années 1950, la menace nucléaire venait des bombardiers soviétiques à longue portée. Ceux-ci furent bientôt rejoints par des missiles balistiques intercontinentaux qui pouvaient atteindre Toronto, Vancouver et d'autres villes nord-américaines seulement quinze minutes après leur lancement. Aujourd'hui, la Russie développe des missiles de croisière et hypersoniques qui, parce qu'ils volent très bas, échapperaient à la détection par les systèmes radar existants lorsqu'ils traversent l'Arctique vers des cibles plus au sud.

Le débat de plusieurs décennies sur l'adhésion du Canada à la défense antimissile balistique américaine n'est pas pertinent face à ces nouvelles menaces. Ce système est conçu pour contrer les systèmes de missiles primitifs de la Corée du Nord et de l'Iran.

Au lieu de cela, nous devons aider à maintenir une destruction mutuellement assurée en améliorant le système d'alerte du Nord avec un radar "au-dessus de l'horizon" qui peut repérer les missiles volant à basse altitude. Le gouvernement canadien va dans cette direction, mais maintenant que Poutine a brisé le tabou nucléaire — en menaçant d'utiliser des armes nucléaires tactiques en Ukraine — les mises à niveau doivent être complétées de toute urgence.

En même temps, la Russie n'est pas sur le point d'envahir l'Arctique canadien, et nous devrions donc éviter de gaspiller de l'argent et des efforts à essayer de nous protéger contre cela.

Comme l'a déclaré le mois dernier le général Wayne Eyre, chef d'état-major de la Défense du Canada, devant le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes : « Je ne vois aucune menace réelle aujourd'hui à notre souveraineté territoriale, et je n'en vois pas non plus dans un proche avenir.

L'évaluation d'Eyre est logique. La Russie est le pays avec la plus grande masse terrestre au monde et possède déjà la moitié de l'Arctique. C'est également l'un des plus grands producteurs de pétrole, de gaz et de nombreux minéraux. La Russie n'a aucune raison de s'intéresser au territoire ou aux ressources naturelles du Canada.

La Russie est également en train de perdre la guerre en Ukraine. L'ouverture d'un deuxième front dans l'Arctique canadien dépasse les capacités de son armée déjà surchargée et malmenée. De plus, toute intrusion en Amérique du Nord entraînerait une réponse conjointe de l'ensemble de l'OTAN, y compris les États-Unis.

Les grands enjeux de sécurité arctique se situent tous dans l'Arctique européen. La majeure partie de la puissance navale et aérienne de la Russie est basée sur la péninsule de Kola, le long de la mer de Barents et de la Norvège.

Les sous-marins nucléaires russes accèdent aux océans du monde par le "fossé Groenland-Islande-Royaume-Uni", et les forces de l'OTAN sont occupées à surveiller les activités dans cette région. Lors d'une conférence de l'OTAN il y a trois ans, j'ai parlé avec le commandant de la deuxième flotte des États-Unis, qui est responsable de la sécurité navale dans l'Atlantique Nord. Il m'a dit alors que l'activité des sous-marins russes près de la Norvège était comparable à ce qu'il avait vu lorsqu'il servait sur un sous-marin d'attaque américain dans la dernière partie de la guerre froide.

Heureusement, le Canada peut aider ici. Nos frégates de la classe Halifax ont été conçues pour la lutte anti-sous-marine dans l'Atlantique Nord, tout comme les tout nouveaux hélicoptères maritimes CH-148 Cyclone qui y servent. Nos avions de patrouille Lockheed CP-140 Aurora ont été conçus pour la même mission. Nous avons également une capacité presque unique d'observer l'ensemble de l'Atlantique Nord et de l'Arctique depuis l'espace, grâce à la Constellation RADARSAT : trois satellites « radar à synthèse d'ouverture » qui peuvent voir la nuit et à travers les nuages.

Nous devons remplacer l'avion de patrouille Aurora, qui a quatre décennies, ainsi que la Constellation RADARSAT, qui a été lancée en 2019 et a une durée de vie prévue de seulement sept ans. Mais nous ne devrions pas prétendre que ces achats, ou tout autre achat militaire, sont nécessaires pour se protéger contre une invasion russe du Canada.

La Russie est une menace existentielle, mais notre souveraineté dans l'Arctique est assurée. Il est important de se concentrer sur les missions qui comptent : aider les États-Unis en matière d'alerte précoce et soutenir tous nos alliés de l'OTAN sur le théâtre européen, de la Norvège à l'Ukraine.

Cet article est basé sur le récent témoignage de Michael Byers devant le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes.

Lire la suite : Politique

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